Refugium peccatorum

Refugium peccatorum

« Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous égarons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous. Si nous reconnaissons nos péchés, lui qui est fidèle et juste va jusqu’à pardonner nos péchés et nous purifier de toute injustice. Si nous disons que nous sommes sans péché, nous faisons de lui un menteur, et sa parole n’est pas en nous. »

Première épître de Saint Jean, 1, 8-10.

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Nous avons été nous-mêmes de grands pécheurs ; nous sommes nés et nous avons grandi dans le péché, nous en avons mangé et, quoique baptisés dans le Christ Jésus, nous n’avons jamais été avares de tentations. Et il y a cela qui est terrible, c’est que plus nous recevons de la lumière, et plus sont éclairés des coins sombres de notre âme que nous ne soupçonnions pas, ou que nous n’aurions jamais appelés ténèbres.

Mais le Seigneur ne se préoccupe pas tant de ce que nous avons été ou de ce que nous avons cru être avant que son doigt ne nous touche le cœur. Si Saül s’était appesanti sous le poids de son péché ou de son remord, il serait demeuré un être vil et misérable, que même l’obéissance à la Loi n’aurai pu justifier : il n’aurait jamais été Paul, il ne serait jamais devenu un Saint, et quel Saint ! Cette pensée est au cœur de ses exhortations et devrait être au cœur de notre foi : nous sommes à présent renouvelés dans le Seigneur, hâtons-nous donc de revêtir l’Homme nouveau ! Car dès aujourd’hui nous connaissons le règne de la grâce ; nous le connaissons selon l’état d’imperfection où nous nous trouvons.

Car ce n’est pas par ses propres forces, mais par les forces que l’Esprit Saint lui procure, qu’il peut accomplir tout ce qu’il accompli ; ce n’est pas non plus pour sa propre gloire, mais pour la gloire de Jésus Christ, qu’il endure tout ce qu’il endure. Si nous prions encore aujourd’hui avec Saint Paul, c’est que Saint Paul prie encore avec nous, fidèle à sa mission jusqu’à la fin des temps. Que la paix et l’amour de Dieu le comblent en plénitude.

Nous pouvons faire étalage de nos misères et de nos fautes, de tout ce qui nous rend indignes, à nos propres yeux, de vivre selon les grâces du Seigneur, de répondre à son Appel ou simplement de nous mettre en prière devant Lui, mais une fois qu’Il nous a pardonné, qu’il nous a remis nos dettes et nos offenses, qu’il a jeté le voile sur nos fautes, qu’il nous a guéri de notre péché, qu’il l’a oublié, alors il nous faut avancer, à pleines voiles, sans plus nous retourner, vers la Maison du Seigneur, où le Christ nous attend et nous a préparé une place.

Alors, il faut commencer par là et sans cesse y revenir. Ce n’est pas seulement que l’intelligence est froide ou stérile si elle n’a pas la charité, c’est qu’elle n’est pas à proprement parler intelligence. C’est parce qu’ils ont aimé la Sagesse que les philosophes ont été portés, par elle, par la Sagesse, si profondément vers les cimes de l’Esprit. L’intelligence et l’amour sont deux opérations distinctes de l’être, mais elle ne constituent pas deux puissances séparées. On n’aime vraiment que ce que l’on connaît, et l’on ne connaît vraiment que ce que l’on aime. C’est une vieille morale de la sagesse chrétienne.

Alors il faut commencer par là, par ce désir de rencontre qui nous pousse à aimer et à connaître, à nos propres frais souvent. Car ni l’amour ni l’intelligence, je veux dire chez l’homme, ne se tournent d’eux-mêmes, naturellement, vers l’unique source de toute sagesse et de tout bien. Cela signifie que nous n’aimons pas toujours bien, pas toujours de bonnes choses, ou que nous aimerions aimer, d’un désir irrévocable qu’aucun amour humain ne comble vraiment. Parce que nous manquons de charité, comme le dit merveilleusement Saint Jean dans sa première épître. Ce manque d’amour dans nos cœurs, c’est comme une maladie, c’est peut-être même la seule maladie, ou la source de toute maladie, en cela que c’est un mal qui touche l’âme, la blesse dans sa nature, puisque de par sa nature, l’âme est faite pour vivre de l’Amour et de la Sagesse de Dieu (non de n’importe quel amour ou de n’importe quelle sagesse). C’est cela qui est « péché », c’est pourquoi le péché peut être défini comme un « manque d’amour » ou un « défaut de charité », et c’est cela qui est précisément, pour l’âme, la « mort ». Si l’âme est bien, comme l’Église nous l’enseigne, un temple ou une demeure pour l’Esprit de Dieu dans l’homme, blesser l’âme dans son essence, c’est blesser la Divinité, c’est offenser Dieu personnellement. Moi-même, Seigneur, je n’entrevois qu’à peine la portée de ce que je suis en train d’écrire. Puisse l’Esprit de Sagesse et de Vérité me guider et m’instruire. Amen.

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