Aujourd’hui, le Seigneur se tourne vers nous…

Aujourd’hui, le Seigneur se tourne vers nous…

Aujourd’hui, le Seigneur se tourne vers nous, nous regarde avec ce regard de Dieu qui transperce notre humanité, et nous invite à nous mettre à sa suite, à devenir ses disciples. Il nous appelle chacun par notre nom, et nous dit : « Suis-moi. » Normalement, c’est là que nous devrions répondre : « Me voici, Seigneur, je viens ! » Mais ce n’est pas toujours évident. Car suivre le Christ recèle une exigence de perfection qui est bien au-delà de nos capacités, qui dépasse même, et de loin, toute la mesure de notre volonté. « Si vous voulez devenir mes disciples, nous dit le Seigneur, renoncez à vous-mêmes, chargez-vous de votre croix et suivez-moi. » À ce moment-là, beaucoup renoncèrent. Et cela se produit encore aujourd’hui, lorsqu’un homme, s’étant mis dans les traces du Seigneur Jésus comme on suivrait les enseignements d’un maître en sagesse, réalise que l’Événement de la Croix est inéluctable, incontournable, et qu’il n’en supporte pas l’apparence, l’idée que l’exigence de Dieu puisse aller jusque là. Mais le Seigneur dit ailleurs, en Saint Matthieu : « Venez à moi vous tous qui peinez sous le fardeau, car je suis doux et humble de cœur, en moi vous trouverez le repos de votre âme… Prenez mon joug, faites-vous mes disciples, car mon joug est facile et mon fardeau léger. » Mais les apparences de la Croix semblent démentir la vérité de cette parole : que ce soit la Passion de Notre Seigneur, ou le martyre des Saints, notre esprit pas plus que notre cœur, qui sont encore en nous très charnels, n’éprouvent le désir de partager cette sorte de gloire. Nous cherchons une résolution de nos souffrances, non à verser notre sang avec le désir de mériter le Ciel. Cela encore, ce sont les apparences qui nous tiennent ; nous ne sommes pas d’abord câblés pour comprendre que la croix que le Seigneur nous demande de porter à sa suite et à son exemple, puisse être réellement un « joug facile » et un « fardeau léger ». Nous ne sommes pas programmés pour comprendre, à travers ce « signe », l’expression la plus parfaite, la manifestation la plus accomplie, du chef d’œuvre de la Miséricorde de Dieu.

Il y a, dans notre vie quotidienne, et dans notre vie de prière particulièrement, des manifestations très concrètes de cette invitation du Seigneur à le suivre, à marcher ici selon son exemple, c’est-à-dire à renoncer à quelque chose de nous-mêmes, de notre « soi », de notre substance si précieuse, non pas pour nous charger de quelque chose de plus lourd que notre conscience, mais simplement pour accueillir ce qui est, recevoir ce qui se donne-là, supporter les joies et les peines avec une égale confiance, une sagesse que les circonstances n’ébranlent pas, non pas en vertu de tel ou tel mérite de notre part – nous ne sommes pas sans mérites, mais nos mérites, ici, pour ainsi dire ne comptent pour rien –, mais parce que nous cessons simplement de substituer notre volonté à la volonté de Dieu, que ce soit sa volonté comprise en son sens général, ou en son sens particulier, nous concernant personnellement. Se charger de sa croix, ce n’est pas surajouter quelque chose à ce que l’on porte déjà, c’est se dépouiller de tout ce qui n’est pas la croix que le Seigneur nous invite à porter, en vue de laquelle il nous prépare spécifiquement. Et c’est parce qu’il consiste en un dépouillement – renoncer à soi-même – que le joug du Seigneur est « léger » ; c’est parce qu’il consiste à laisser faire le Seigneur selon l’œuvre de sa volonté, sans avoir à y mettre notre grain de sel, sans avoir à y mettre autre chose que notre oui, notre fiat, à l’image de la Vierge Marie, qui fut si bien préservée qu’elle n’eût jamais de « soi », d’exigence de soi, à opposer à la volonté de Dieu : Fiat mihi secundum verbum tuum.

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