Méditation de la Porte

Méditation de la Porte

Cette porte…

C’est une méditation qui m’a été proposée, je ne sais pas lequel de mes instructeurs angéliques, peut-être est-ce par Sainte Thérèse d’Avila elle-même : Je me visualise petit garçon, cet « enfant intérieur » dont on nous parle beaucoup dans ces temps, avec cette idée que nous pouvons/devons aller à sa rencontre, le rejoindre, lui permettre de guérir à l’intérieur, de nous guérir nous-mêmes… C’est l’enfance de l’âme, éternelle, comme l’âme est éternelle, qui sont ses caprices, et qui sont son innocence. Ses blessures, c’est le mal dont elle est souillée, soit qu’elle ait commis l’injustice, soit qu’elle l’ait subie, et qui entrave, déséquilibre, voire compromet dangereusement (mortellement) sa relation à Dieu.

Le petit garçon se trouve devant une porte immense, comme la porte d’un château ou d’une cathédrale. Je visualise la porte devant moi, dans une lumière sombre, mais je ne vois pas ce qu’il y a autour ; je ne sais pas si je me trouve à l’intérieur d’une forteresse, où je serais comme retenu prisonnier et d’où je réclamerais de sortir, ou si je me trouve à l’extérieur et que je demande à entrer.

La porte a bien dû s’entrouvrir une fois ou deux, en sorte que je puisse entrapercevoir quelque intrigante lueur en provenance de l’autre côté, sans quoi je ne m’expliquerais pas cette soif et cette impatience à la voir s’ouvrir, à me voir inviter à entrer, moi aussi, dans la joie du Seigneur ; cette incompréhension qui m’aura tourmenté près de quinze ans de ma vie, qui aura été le drame de mon existence comme le premier péché commis par le premier homme fut le drame de la création, de n’être pas encore passé de l’autre côté.

L’enfant capricieux caprice, il cogne contre la porte, il rugit, il menace, il gratte du pied la poussière du sol comme une bête furieuse, il fulmine, il cogne et il hurle encore plus fort, il craque, il pleure, il se roule par terre, son cœur se déchire entre haine et désespoir, il porte les mains à son cou, il tente la mort, et sa honte retombe sur lui, comme la nuit sur son âme, et le menace d’une douloureuse éternité.

L’enfant sage et lumineux ne sait pas plus que l’autre ce qui se trouve ou ce qui ne se trouve pas derrière cette porte ; il ne sait pas non plus comment l’ouvrir, et il ne sait pas mieux pourquoi, alors qu’une fameuse nuit d’été tout semblait lui avoir été ouvert et dévoilé pour l’éternité, tout était demeuré si longtemps… Et s’il ne connaît pas la solution, il discerne du moins dans la conduite irrationnelle et irascible de son alter-ego, dans sa soif, son impatience, sa faiblesse et son orgueil, une raison suffisante. Aussi décide-t-il de s’y prendre autrement : de rentrer par le chemin de la prière, par la porte de l’oraison. Aussi, je visualise cet autre enfant, qui est le même enfant que l’autre, mais que les épreuves ont assagi, guéri, et qui se trouve peu à peu rendu à son innocence, je l’imagine à genoux, en prière devant la grande porte, comme si elle devait s’ouvrir d’un instant à l’autre, peut-être pas encore obéissant, mais qui apprend l’obéissance, la patience et l’humilité, à se faire docile à la volonté du Seigneur. Que la porte ne se soit pas encore ouverte, ou qu’il ne soit pas encore, lui, passé de l’autre côté, cela ne constitue pas une raison, encore moins une excuse pour renoncer, ou pour céder au caprice, à la tentation, au désespoir. Au contraire. Ce sont des siècles d’impatience qu’il s’agit de traverser, cela ne se réalise pas en quelques heures et cela ne se fait pas au hasard. Et nous ne disposons d’aucune règle à l’aune de laquelle nous pourrions mesurer notre progression, savoir si nous sommes plus ou moins proche de notre éveil ou de notre salut ou de la dilatation de notre cœur par où la lumière peut sortir et entrer librement. C’est aussi cela, la sagesse que nous apprenons, la patience de notre accomplissement, qui nécessite la confiance en Celui qui nous accompli, et plus qu’une simple confiance, puisque c’est l’amour même de Dieu qui agit à travers nous, dans les œuvres de son Esprit Saint.

Soyons donc cet enfant sage, qui jeûne et veille dans la prière, dans l’attente émerveillée de Celui qui pourrait ouvrir la porte, franchir le seuil et nous ravir, comme l’Époux ravissant sa fiancée à l’orée du jour.

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