Le livre

Le livre

Le matin est certainement le meilleur moment pour écrire, là où les pensées sont les plus vives, les mieux à même de se dire sans détour. J’entends les anges rire dans leur grand ciel, s’esclaffer de louanges, car je tiens le livre fébrilement, l’esprit aux aguets, comme si je faisais là un autre pas, irrécupérable, du côté où il ne faut surtout pas raconter l’histoire. Hier encore je regardais par-dessus mon épaule pour m’assurer que mes anciens amis ne me pointassent point du doigt : « Regardez-le ! Regardez-le, qui sombre dans le côté obscur ! » Cependant qu’eux, il est vrai, ne font que sombrer… Mais en réalité il ne s’agissait que d’un voile, une étoffe bon marché que l’on nous vendit comme l’ouvrage des siècles, qui recouvrait l’histoire et la vérité, et qui nous illuminait de mensonge. Il est certainement plus facile de traverser, aujourd’hui, qu’il y trente ou quarante ans, quand il fallait encore être « héroïque » : tout est prêt de tomber, et la génération qui s’apprête à se lever, dans ce fracas des ténèbres, sera au moins aussi séduisante et dangereuse que celle-là…

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